BALZAC
J’étais gros, petit et mal fait
En un mot j’étais très laid !
Mais non dénué d’esprit
De dettes et de très bons amis…
Les usuriers sans cesse me poursuivaient
Les éditeurs me harcelaient aussi
Ma maison avait toujours une double sortie
En buvant mon café, j’écrivais, j’écrivais, j’écrivais…
Quand au portail on sonnait,
Par la porte de secours je fuyais…
Un ami venait m’héberger,
Quand l’usurier se faisait trop pressant
Je déménageais en vitesse à l’encan
Ma vie fut une fuite éternelle
Devant les puissances matérielles...
Heureusement je buvais mon café
Et j’écrivais… j’écrivais... j’écrivais…
Par un jour gris, mes amis décidèrent
Dans une grande fête ils m’emmenèrent,
Là, par hasard, passa entre mes mains,
Le médaillon d’une fée ! Regardez donc, enfin !
Non, c’était une comtesse, mariée et pour de bon
Sage comme l’image, Marie était son nom.
Depuis ce jour mon cœur battit plus fort
Mes personnages me semblèrent fades, morts ;
En moi, vivait Marie aux cheveux d’or !
Ah que mes amis en ce jour furent bons...
Ils retrouvèrent son adresse, et son nom.
J’avalais mon café, devant ma page blanche
Puis j’écrivais…j’écrivais .C’était dimanche !
Mes mots qui lui parlaient d’un amour infini…
N’ont pas effarouché la si belle Marie !
J’oubliais mes soucis, l’usurier, l’éditeur,
J’écrivais à ma blonde, lui dévoilant mon cœur.
N’étant pas trop timide, elle me répondit…
Malgré sa vie de femme, ses enfants, son mari…
Elle habitait dans la Pologne lointaine
Nos lettres respiraient d’une même haleine…
Cela dura pendant plusieurs années
Pendant lesquelles j’écrivais…j’écrivais…
D’amoureux transis, je me fis exigeant,
Je voulu à tout prix une fois la rencontrer !
Elle choisit la Suisse par un jour de printemps
Dans cette ville d’eaux je partis en chantant,
La voir, enfin l’aimer, pouvoir la caresser…
Je fus là ! en avance de plusieurs journées !
Puis elle arriva, ses enfants l’entouraient,
Son regard bleu et froid me détailla à peine,
Elle me dit : « Rendez-vous à la semaine prochaine. »
L’amour, l’exaltation faillirent m’étouffer
Je la suivais de loin écrivant des billets
Elle m’évita, chez des amis communs
Et je partis piteux, pour elle je n’étais rien.
Maintenant devant d’innombrables cafés,
J’écris toujours pour elle … ou pour l’éternité !
Natacha Péneau