le temps
S’il était mis en fût il serait un chablis
Que l’on boit à vingt ans comme le vin de messe,
Ignare des tourments quand brûle la jeunesse
Au son des tambourins et des gais tirelis.
Peut être serait-il une fraîche mouture
Aux reflets chatoyants dans un verre trop plein?
Revigorerait-il l’homme sur le déclin
Pleurant tous les chagrins d’une déconfiture?
Il coulerait à flots, fidèle compagnon,
Ponctuant les destins d’un délicat breuvage,
Irait accompagnant le baptême ou veuvage
D’un fameux millésime ou pelure d’oignon.
Contemplant la foulure et le jus qui s’échappe,
Il serait triomphant s’il était au pressoir,
Quand la visse et son glas, sur le bourru du soir
Laissent les grains sans vie arrachés de la grappe.
S’évente et s’évapore un vin quand il vieux,
L’homme en fait tout autant, la belle métaphore !
Ils s’en vont tous les deux gisants dans une amphore,
Rejoindre les tombeaux dès l’automne pluvieux.