Les Volcans de Larmes
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L'essentiel de la douleur humaine
 
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Lilas




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MessageSujet: Secret   Secret Icon_minitimeVen 11 Jan - 5:27

Le cri résonne dans ma tête, ce long échos qui déchire l'air glacé d'un matin d'hiver. Tout tremble. Le temps se fige à cette minute précise, comme punaisée au mur du temps, ce fleuve inexorable qui charrie nos vies à son rythme vers l'inconnu. Pas de retour possible... La lumière du jour, éclatante dans sa blancheur hivernale, devenue grise tout à coup, me submerge en vagues violentes et frappe autant mon corps que mon esprit.

Est-ce moi qui ai crié? Oui, je crois, mais sans ouvrir la bouche, juste à l'intérieur, là, entre mes côtes, et ce cri creuse son chemin vers ma gorge qui s'étrangle pour mieux le retenir.

Douleur.

Je me crispe, les mains serrées et blanches, les lèvres étirées sur un sourire de commande. J'écarquille les yeux, la vue troublée par les larmes naissantes. J'ai froid. Je me sens seule et misérable. J'ai mal.

C'est pourtant Noel et la maison est pleine de rires joyeux et d'odeurs délicieuses. Les enfants sont là, avec leur marmaille que j'adore. Tout ce petit monde se retrouve dans le vacarme des conversations qui s'entrechoquent et s'entrecroisent follement, comme si un chef d'orchestre fou battait la mesure. C'est à qui se fera le plus entendre. Mais qui écoute?

Tout cela me parvient de loin, comme à travers un brouillard épais qui assourdirait les voix. Dans cette cuisine famillière, où d'habitude je me sens si bien, j'ai juste envie d'être seule, à contempler le jardin recouvert de neige par la fenêtre. Seule avec mes souvenirs douloureux, comme quand on a mal aux dents et qu'on a une seule idée, se rouler en boule et dormir, ne plus penser, ne plus ressentir. Et je voudrais ne plus ressentir ce vide, cette absence.

J'ai cuisiné toute la journée pour satisfaire leur gourmandise, ainsi que j'ai l'habitude de le faire tous les ans. Mais aujourd'hui, mes gestes sont machinals, le plaisir n'y est pas et les sauces ont le goût amer des regrets.

Mon tout petit...

Je pense beaucoup à toi, tu sais. Au long des années, je t'ai raconté cent fois, mille fois cette histoire, dans ma tête. Tu n'as pas été voulu, c'est vrai. J'avais quinze ans, j'étais jeune et enthousiaste, passionnée et hardie. Rien ne me semblait impossible. J'ai rencontré ton père au lycée. Il était beau. Lorsque j'y songe, je vois encore ses yeux si bleus, son sourire frondeur, sa silouhette élancée, avec quelque chose de fragile qui m'émouvait. Je suis tombée amoureuse, comme on l'est à cet âge, sans partage, sans réfléchir, sans voir plus loin que le bonheur d'être aimée de lui. Je lui ai cédé, un soir de boume, entre deux slows langoureux, blottie contre lui. Plus rien ne comptait. J'avais des étoiles dans la tête.

Les jours passant, je me suis rendu compte que quelque chose n'allait pas. Il y eu des nausées matinales, tout d'abord, qui me laissaient sans appétit et sans force. Puis, mon ventre s'est arrondi. J'étais térrifiée. Mes parents, qu'allaient-ils penser? Et mes amis? Alors, j'ai dissimulé mon ventre, reculant le moment de l'aveu le plus possible. C'était illusoire, bien sûr. Ma mère s'en est aperçu. Cela a été le drame à la maison, j'avais trahi leur confiance, je n'étais qu'une moins que rien. J'ai même fini par le penser. Quand aux regards des gens, je ne t'en dirai même rien, tant ils étaient remplis de mépris pour mon gros ventre. Pour couronner le tout, ton père m'a laissée tomber, fuyant ce qu'il considérait comme un fardeau, une gêne pour son avenir. Alors je t'ai porté seule, jusqu'au bout. Je t'ai senti grandir et bouger dans mon ventre. Je t'ai tout confié, comme à un ami. C'est une décision que j'ai prise, malgré l'avis de mes parents. J'ai quand même pu faire entendre ma voix, mais contre la promesse de t'abandonner.

Voilà...Le mot est lâché, celui qui blesse, qui déchire, qui transperce mon coeur en permanence, depuis toutes ces années.

Le jour de ta naissance, mes parents m'ont emmenée à la clinique sans un mot de réconfort, sans un geste tendre. Tu étais un poids dont il fallait se débarrasser au plus tôt, les choses ayant assez duré pour eux. Les sage-femmes, des religieuses, ne m'ont guère aidée non plus. Après tout, je n'étais qu'une fille dévergondée qui payait le prix de sa faute. A l'époque, être une fille-mère, comme on disait, était une honte. Je n'avais qu'à souffrir pour expier. Elles m'ont quand même laissée te prendre dans mes bras un instant. J'ai tenté de graver tes traits dans ma mémoire. J'ai caressé ta petite tête toute douce, recouverte d'un fin duvet blond. J'y ai déposé un baiser, seul cadeau que je pouvais te faire avant de te laisser partir. Et puis, je suis restée seule, détruite, vide, triste. Cela a duré de long mois. Il me semblait que je n'allais jamais sortir de ce tunnel sombre où je m'étais enfoncée. Certains jours, je n'avais plus le goût de vivre. Il a fallu que mon corps se remette et que je me reconstruise face aux autres qui chuchotaient dans mon dos.

Les années ont passé, bon gré mal gré. J'ai raté mes études, j"avais perdu tout mon enthousiasme, toute ma flamme. J'étais vraiment la moins que rien aux yeux de tous. Tu étais toujours en filigrane dans mon esprit, un rappel constant, une plaie ouverte. Rien ne m'intéressait, j'ai beaucoup erré, fait quelques bétises. Il fallait bien que j'entretienne ma réputation de mauvaise fille. Puis un jour, j'ai rencontré mon futur mari. Il était doux et a su apprivoiser la sauvage que j'étais devenue. Nous avons fondé une famille, somme toute heureuse. Des petits-enfants sont venus fleurir ce tableau si joli.

Mais ils ne savent pas. Non, ils ignorent totalement ton existence. Je n'ai jamais osé en parler à mon mari, j'avais bien trop peur, peur du rejet, de sa colère.Et mes parents se sont tacitement tu, bien trop heureux que je trouve enfin à me caser. Alors, tu es toujours là, à mes côtés, et particulièrement le jour de Noel, quand nous sommes tous réunis. C'est presque insuportable, je suis comme une corde prête à rompre. J'ai parfois envie d'en finir avec tout ça, tout leur avouer, pour être enfin en paix, une bonne fois pour toute. Je prie pour que tu me retrouves, que tu en aies la volonté. Et puis, ça n'arrive jamais...

Enfin!...Il faut que j'y retourne, ils doivent se demander ce que je fais.

Tiens, on sonne à la porte!.
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Rodes (nurtapa)
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Rodes (nurtapa)


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MessageSujet: Re: Secret   Secret Icon_minitimeVen 11 Jan - 7:25

La sonnerie finale laisse un espoir de lendemain. Certaines confessions dont difficiles à faire , mais peut-être est-ce une simple fiction.
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Lilas




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MessageSujet: Secret   Secret Icon_minitimeVen 11 Jan - 16:28

Oui, Jérôme, c'est en effet une fiction.
Belle et douce soirée.
Je t'embrasse.
Lilas.
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MessageSujet: Re: Secret   Secret Icon_minitime

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