Je t'ai laissée, ô Mère, pour courir la mer,
Sur mon beau coursier en fibres de carbone.
J'ai levé l'ancre et suis parti, faisant le fier,
Pour ne pas voir pleurer tes yeux de madone.
J'avale les miles, le nez dans les embruns,
Solitaire marin d'une course aux caps,
Fut-il d'espérance, à travers tous les grains,
Défiant tous les icebergs et les vents qui frappent
Sans presque dormir, continuellement saoulé
D'humidité et de froid, les doigts écorchés,
Contre le temps je me bats ,et les éléments,
Déchaînes, contrarient ma route, véhéments.
Je pense à toi, restée seule au village,
Près de l'église, où Père gît sous la pierre.
Dans la cuisine désertée, vers la plage,
Tu n'as que ma voix pour te rassurer, amère.
Nos solitudes se confondent, ne font qu'une.
Coupable je suis de ne pouvoir résister
A l'appel des vagues, de la fortune,
De la mer, amante qu'on ne peut oublier.